LA LETTRE DU GLOBETROTTEUR

 Mars 2024 •

Cet enfant qui pleure pendant le culte...

Quand j'étais plus jeune, je ne faisais pas trop attention aux enfants qui pleuraient à l'église pendant le culte. Il faut dire que j'étais moi-même jeune. Et les rares fois où cela a dû attirer mon attention, c'est parce que les pleurs avaient duré assez longtemps ou avaient été assez forts. Puis en grandissant je me suis peu à peu approprié le discours des adultes m'environnant sans m'en rendre compte. 
Moi aussi, ça a fini par m'agacer petit à petit, ces bébés qui pleuraient et ces parents qui apparemment ne faisaient rien pour les calmer. Ces enfants qui dérangeaient le culte, qui nous empêchaient de suivre, qui nous perturbaient... J'étais énervé intérieurement par la passivité des parents qui prenaient trop de temps à réagir en amenant leurs enfants dehors.

Puis j'ai commencé à voyager. J'ai vu d'autres églises et je me suis rendu compte qu'il existait encore des églises où les parents savaient s'occuper de leurs enfants. Où les sermons n'étaient jamais perturbés par des enfants indisciplinés et des parents laxistes et où les prédications n'étaient jamais interrompues par des pleurs de bébés. J'étais enfin soulagé, je pouvais enfin profiter du message.

Les années ont passé, et au fur à mesure je ressentais une autre frustration au fond de moi. Je regardais autour de moi, mes amis d'enfance, ma famille et ces enfants avec qui j'avais grandi : nombreux étaient ceux qui avaient quitté l'église. Je regardais aussi des églises que j'avais visitées, certaines étaient vides, nos églises - principalement en Europe et dans certains coins d'Amérique du Nord - avaient du mal à croître et la population vieillissait à vu d'œil...

Puis un jour j'ai visité une église, je ne me souviens plus de laquelle. Mais ce dont je me souviens, c'est que ce sabbat-là j'étais heureux de voir une église pleine. J'étais assis vers le fond, pas loin des familles, puis j'ai entendu un enfant pleurer pendant le sermon. Et comme d'habitude, personne n'a réagi. Mais cette fois au fond de moi, j'ai ressenti une sensation étrange, j'étais content. Et je venais de me rendre compte d'une chose, cet enfant qui pleurait était le signe de plusieurs choses positives.

Il y avait dans cette église des familles avec leurs enfants qui se sentaient à la maison, il y avait plusieurs générations sous le même toit, donc le risque que cette communauté ne disparaissent en raison du vieillissement de la population était réduit. Une église qui laisse à ses plus petits le droit d'exister, même quand parfois il dérangent un peu, est une église vivante. Je ne dis pas qu'il faille laisser les enfants courir partout, crier pendant le culte ou ne rien respecter. Je dis qu'il faut construire un espace où les familles savent qu'elles ont leur place. Un lieu où les enfants se savent aimés et où l'on peut leur enseigner l'amour de Dieu.

Depuis cette prise de conscience, j'ai décidé de participer activement à la création de cette atmosphère. J'ai suivi une formation proposée par le RPI (l'institut de pédagogie religieuse de l'Église Adventiste en Allemagne) pour aider auprès des classes de l'école du sabbat, quand ils manquent de bras pour les petites sections, par exemple. Quand un enfant pleure, ou quand les parents sont dépassés, je me demande plus souvent ce que je peux faire pour eux, pour qu'eux aussi puissent profiter du culte et ne se sentent ni jugés, ni abandonnés.

Cette démarche devrait être celle de tous ceux qui ont à cœur la croissance de l'église mais aussi que ceux qui y sont et veulent y rester. À quoi bon amener des gens à l'église, si c'est pour les perdre quelques années plus tard quand ils décident de fonder une famille?

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